« Je ne suis pas seul à être seul » de Jean-Louis Fournier (JC Lattès, 2019) #RL2019

La semaine dernière, je vous avais promis mon avis sur le nouveau livre de Jean-Louis Fournier, et voilà que ça arrive ! J’ai retrouvé l’auteur presque dix ans après l’écriture de Veuf, que je n’ai lu qu’il y a quelques jours et je suis convaincue qu’il fallait le lire avant de découvrir celui-ci. Comme pour chaque nouveau récit, j’ai chaque fois l’impression de le connaître un peu plus, un mieux, comme un ami dont ont prend des nouvelles de temps en temps, sans savoir combien de temps il nous faudra pour remettre les pendules à l’heure, mais qu’importe.

Quatrième de couverture : « Le premier souvenir de solitude ? Un petit garçon coiffé en brosse qui réclame sa mère à l’accueil d’un grand magasin.

Plus tard, c’est un enfant de 10 ans qui nage seul dans la mer du nord et qui lorsqu’il se retourne découvre la plage vide : personne ne l’a attendu. Puis c’est la première danse refusée, la première rupture, le premier deuil, mais c’est aussi tous ces moments choisis, voulus, espérés, goutés : seul avec un livre, avec une musique, seul à regarder les autres, seul en écrivant. Jean-Louis Fournier est toujours ce petit garçon, fils unique qui rêvait d’amitiés et d’une grande famille mais qui espérait aussi s’échapper, grandir, rester seul.

Aujourd’hui dans un grand appartement, après la mort de sa femme, de ses amis, de son éditeur, ce désir des autres et ce besoin de solitude sont restés les mêmes et il passe de l’un à l’autre. Avec un mélange de douceur, de tristesse et d’espièglerie, il regarde les fenêtres toujours fermées de ses voisins (des gens seuls comme lui ?), il observe ce monde où les hommes sont ultra connectés et semblent n’avoir jamais été aussi seuls, il attend la visite d’une jeune femme qui l’emmène au musée, qui le distrait, lui apporte sa jeunesse : mais des deux qui est le plus seul ?

Un livre tendre, délicat, mélancolique parfois qui ressemble à une aquarelle de Turner et à un dessin de Sempé. »


Nous voici face à des réflexions et des pensées qui mêlent une solitude personnelle et la peur de l’abandon qui habite l’auteur depuis l’enfance. Jean-Louis Fournier a toujours eu besoin d’être rassuré en étant entouré, de se sentir exister dans le regard de l’autre, dans son attention. Mais voilà, la triste réalité veut qu’en vieillissant on survive à sa famille (parfois fort injustement), à ses amis, à son épouse. Malheureuse réalité dans laquelle l’auteur trouve la force d’amener un peu de lumière et de facétie.

Nous embarquons pour un voyage en solitude, avec ses chagrins et ses petites joies, avec les souvenirs que l’on se retrouve seul à conserver faute de pouvoir les partager avec quelqu’un qui se souvient. Gardien de moments d’une époque révolue, quitte à parfois douter de la véracité des évènements faute de pouvoir confronter sa mémoire personnelle à celle d’un autre. Entre la solitude imposée et la solitude choisie (comme les anglais ont eu le bon sens de distinguer l’un et l’autre), Jean-Louis Fournier va nous promener dans son quotidien, dans ses attentes, dans ses silences, dans ses moments de vie à plusieurs aussi, qui se réjouissent de retrouver un peu de calme. Car c’est de cela qu’il s’agit : pour vivre la solitude avec satisfaction, il faut pouvoir la désirer entre deux moments bruyants et collectifs.

Dans notre société de la multitude souffrir de solitude reste courant et, chaque auteur peut compter sur la présence de ses lecteurs ; chaque lecteur peut compter sur la présence des auteurs. Ces derniers possèdent en plus une presque immortalité. Ils restent et sont écoutés tant qu’il y aura des lecteurs. L’auteur le dit bien, nous ne sommes jamais seuls dans une bibliothèque. Enfin, concrètement, c’est bien joli tout ça, mais ne devrions-nous pas être plus attentifs aux solitudes qui nous entourent ?

Si Jean-Louis Fournier conserve le goût des mots, de leurs sens et de leurs sons, ce livre est peut être le plus grave. Pourtant, des sujets graves, l’auteur en a évoqué par le passé. Mais chaque livre est une surcouche qui rend l’ensemble assez fataliste, avec chaque fois l’impression que rire de tout devient plus difficile. Malgré tout, l’humour reste présent, une lumière dans la nuit, et j’ai bien ri grâce aux petites capsules sur les voisins d’en face qui sont égrenées tout au long du livre, grâce aussi au caractère de l’auteur qui conserve encore, malgré les années, l’espièglerie de l’enfance.

Je tiens à remercier chaleureusement les éditions JC Lattès et NetGalleyFrance pour m’avoir accordé l’accès à ce livre en service de presse.

Pour en savoir plus

 


Ils/Elles l’ont aussi lu et chroniqué : Psych3deslivresLes chroniques de Koryfée


 

Et vous, tiendrez-vous compagnie à Jean-Louis Fournier le temps de ce livre ?

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