Ce roman était pour moi l’un des indispensables de la rentrée littéraire : pour son sujet, pour sa maison d’édition fiable et pour son auteure que je n’avais pas encore découverte mais dont j’avais pu croiser les recueils de nouvelles – qui sont passsés de la wishlist à la PAL durant l’été.
Quatrième de couverture : « Peut-on réparer l’irréparable, rassembler ceux que l’histoire a dispersés ? Blanche, rwandaise, vit à Bordeaux après avoir fui le génocide des Tutsi de 1994. Elle a construit sa vie en France, avec son mari et son enfant métis Stokely. Mais après des années d’exil, quand Blanche rend visite à sa mère Immaculata, la mémoire douloureuse refait surface. Celle qui est restée et celle qui est partie pourront-elles se parler, se pardonner, s’aimer de nouveau ? Stokely, lui, pris entre deux pays, veut comprendre d’où il vient.
Ode aux mères persévérantes, à la transmission, à la pulsion de vie qui anime chacun d’entre nous, Tous tes enfants dispersés porte les voix de trois générations tentant de renouer des liens brisés et de trouver leur place dans le monde d’aujourd’hui. Ce premier roman fait preuve d’une sensibilité impressionnante et signe la naissance d’une voix importante. »
Ce roman porte d’un très belle voix plusieurs générations marquées par le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994. Mais pas que. Il s’agit de portraits de femmes qui tentent de renouer un dialogue, d’effacer les non-dits sans réussir à vraiment se parler. Immaculata, la mère restée au pays, nous parle aussi en tant que femme qui aura fait face aux qu’en dira-t-on violents avant que le pire de l’histoire contemporaine du pays des mille collines ne se produise. C’est en cela que ce roman prend une autre dimension : la réalité de vies fauchées, que ce soit physiquement ou moralement, prenant en compte la vie d’avant et celle d’après, si tant est qu’elle soit possible. Sa fille, Blanche, a été envoyée en France et a échappé aux vagues de machettes et de sang. Elle n’a pas vu, elle n’a pas vécu et, d’une certaine manière, cet exil protecteur est une blessure vive et franche, une coupure avec ses proches. Comment comprendre ce que l’on n’a – heureusement – pas vécu, comment reprendre le dialogue quand les mots ne peuvent être formulés ?
Blanche va faire un voyage pour revoir sa mère et son frère, pour retrouver les odeurs et les couleurs, la maison de son enfance. Un voyage pour réparer une séparation, pour réparer des coeurs abîmés et des esprits traumatisés, prisonniers du passé. Deux femmes se rencontrent, deux vies qui portent leurs culpabilités, mélange de victoires et de regrets : d’avoir protégé, d’avoir abandonné, de ne pas avoir été là, de ne pas avoir pu retenir. Le frère est un fantôme, vieux avant l’âge d’avoir vu ce que l’homme peut faire de pire à ses semblables.
Une troisième génération vient au monde : Stokely. Et, comme pour d’autres traumatismes de l’histoire, les petits-enfants osent poser des questions et ont besoin de savoir. Ils ont parfois les clés inattendues de la parole des anciens et un lien nouveau, de renaissance va pouvoir se créer.
Ce roman questionne la culpabulité, la résilience, la transmission mais aussi l’identité et les origines dans un pays marqué par le colonialisme, les discriminations physiques, qui reste sous le choc de son histoire récente malgré sa courageuse reconstruction. Une magnifique découverte qui m’encourage à lire Lézardes et Ejo très prochainement.
Je tiens à remercier les éditions Autrement de m’avoir permis l’accès à ce livre en avant-première.
Pour en savoir plus
Ils/Elles l’ont aussi lu et chroniqué : La Belette Stéphanoise
Et vous, connaissiez-vous cette auteure et/ou souhaitez-vous la découvrir ?