« Irmina » de Barbara Yelin (Actes Sud, 2014)

Traduit de l’allemand par Paul Derouet.

Je n’ai pas pu profiter du réseau des médiathèques comme je l’aurais voulu depuis un an et demi et quel plaisir de pouvoir y retourner sereinement ! Parmi mes premiers emprunts, ce livre qui me faisait de l’oeil depuis des mois et des mois. Un roman graphique de près de 300 pages, bel objet littéraire qui vient interroger une trajectoire individuelle dans l’histoire collective allemande des années 1930 et 1940.

Quatrième de couverture : « Inspiré d’une histoire vraie, le parcours d’une femme allemande des années 1930 à 1980. Un drame poignant sur le conflit entre l’intégrité personnelle et les compromis auxquels peut conduire l’ambition. À travers des images suggestives et pleines d’atmosphère, l’évocation d’une carrière pleine de fractures, exemplaire de la complicité que beaucoup ont nouée avec le régime hitlérien, en détournant les yeux et parce qu’ils y trouvaient avantage. »

Irmina est une jeune femme allemande qui va chercher l’émancipation en Angleterre. Etudiante dans une école la formant au secrétariat et à la dactylographie, elle a de grandes ambitions et souhaite faire ce dont elle a envie, comme elle en a envie. C’est dans ce pays qu’elle va faire la rencontre d’Howard, originaire de la Barbade (alors colonie de l’empire britannique). Un amour va naître, faisant fi des convenances racistes de l’époque, car Howard est noir.

Forcée de rentrer en Allemagne où le parti national-socialiste a pris le pouvoir, Irmina va se retrouver confrontée à des déconvenues et à des choix.

A travers ce portrait de femme, inspiré par les carnets de sa propre grand-mère, Barbara Yelin explore l’adhésion passive à un système fasciste et génocidaire. Avec Irmina, elle montre comment des frustrations autocentrées peuvent rendre aveugles, comment une soif d’ascension sociale peut se faire complice d’un modèle abject. C’est ce profil de passivité qui intéresse ici. Comment tant d’Allemands ne pouvaient-ils pas savoir ce qui se passait réellement, comme il a été dit à la sortie de la guerre ? Pourquoi ne voulaient-ils pas savoir serait plus juste. Car il s’agit bien de regards détournés qui, couverts par cette fameuse passivité, ont permis en partie l’inimaginable et l’irréparable.

Une réflexion passionnante sur les vies civiles en périodes de tensions et en temps de guerre. Presque un appel à la vigilance dans nos propres comportements : ne pas se laisser berner par de trop belles promesses, conserver des valeurs morales.

Un style graphique impressionnant dans ses plans larges de paysages et ses planches sur doubles-pages, moins convainquant dans sa représentation rapprochée des visages et des expressions.

En savoir plus

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Et vous, quel livre avec un personnage principal moralement critiquable conseillez-vous ?

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