❤ « La route de Beit Zera » de Hubert Mingarelli (Stock, 2015 ; Points, 2016)

Quand j’ai un petit coup de mou, que je n’ai envie de rien, j’ai une solution : m’aménager un moment en tête à tête avec Hubert Mingarelli. Là est aussi la force de la littérature, permettre des moments d’humanité et de partage au-delà du temps et de l’espace, faire que certains·es auteurs·trices nous remettent sur pieds quand nous en avons besoin.

Quatrième de couverture : « Stépan vit seul avec sa chienne non loin de Beit Zera, depuis que son fils Yankel est parti se cacher à l’autre bout du monde. Il rêve au bonheur qu’il aurait à le retrouver et se souvient de l’époque où il contrôlait les Palestiniens à la frontière, incapable de soutenir leurs regards noirs. Jusqu’au jour où l’un d’eux, un garçon nommé Amghar, s’aventure chez lui et bouscule sa solitude… »

J’ai eu besoin d’Hubert Mingarelli récemment et j’ai eu un nouveau coup de coeur pour cet auteur qui a définitivement une place à part dans mon coeur de lectrice (j’espère chaque mois l’annonce de la parution d’un roman posthume, tout va bien).

Plusieurs relations sont au coeur de ce roman vibrant : Stépan et son fils Yankel qui a dû s’exiler, Stépan et sa chienne aujourd’hui affaiblie, Stépan et son ami de jeunesse Samuelson, Stépan et le jeune garçon Amghar, Amghar et la chienne. Traverse le récit en filigrane, Hassan, victime d’une ambiance composée de tensions et de peurs. Victime du conflit israélo-palestinien représenté ici à hauteur d’hommes et d’enfants, par le prisme des blessures, des absences et de ce qui ne peut être réparé.

L’auteur nous propose une histoire qui reprend certains de ses thèmes récurrents : la paternité et la filiation, la rupture et l’absence, les blessures intimes qui se lient aux blessures des lieux, les silences et les voix retenues, les difficultés et les subtilités dans les rapports aux autres, le lien que peut nouer l’humain avec la nature et les animaux. La chienne a ici une place centrale et on ressent avec puissance la force des expériences que l’auteur a pu vivre lui-même avec cet animal.

Roman sur la peur, la violence issue des discriminations et son impact sur les vies individuelles, il parle aussi du deuil. Mais c’est sans compter sur une lampe torche dans la nuit, qui éloigne l’obscurité. Cette lumière qui vient donner un peu d’espoir.

On pourrait résumer l’intrigue en quelques phrases mais ce serait un affront à la délicatesse et à la précision des mots et des émotions d’Hubert Mingarelli. Par son écriture réduite à l’essentiel tout devient puissant et marquant, et la magie opère.

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Et vous, quel·le est votre auteur·trice préféré·e ?

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👁 « L’homme qui avait soif » d’Hubert Mingarelli (Stock, 2014 ; J’ai lu, 2015)

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Voilà un roman qui serre le coeur comme Hubert Mingeralli savait les écrire, mais sans en faire trop, en toute simplicité qui cache cependant une écriture complexe, réduite à l’essentiel. Il nous parle de l’impact de la guerre sur les hommes à travers le personnage d’Hisao, traumatisé et habité par une soif obsédante.

Quatrième de couverture : « Japon, 1946, pendant l’occupation américaine. Démobilisé depuis peu, Hisao revient de la montagne avec une soif obsédante et des rêves qui le hantent. À bord du train qui doit le conduire vers la femme aimée, il commet une terrible erreur. Descendu pour boire, il voit le train repartir avec sa valise et l’œuf de jade qu’il a prévu d’offrir à Shigeko.

Alors qu’un suspens subtil mais intense invite le lecteur à suivre les péripéties d’Hisao courant après sa valise, se dessine la bataille de Peleliu où il a combattu aux côtés de Takeshi, jeune soldat troublant qui chante dans le noir. Et qui mourra à ses côtés.

Dans ce roman aussi puissant que poétique, Hubert Mingarelli évoque avec une rare élégance l’amitié entre hommes et le Japon meurtri par la guerre. Hisao retrouvera-t-il sa valise et arrivera-t-il jusqu’au mystère Shigeko ? »

Dès l’ouverture du roman, Hisao a soif et va tout faire pour boire, perdant ainsi sa valise et le cadeau qu’il souhaitait offrir à sa fiancée, Shigeko. Cette jeune femme, il ne l’a jamais vue et il part justement la retrouver. La valise, synonyme de promesse de bonheur avec Shigeko – et donc de nouvelle vie -, va devenir sa quête à travers un Japon très loin d’être remis de la guerre. Et cette course sur les routes, rythmée par la soif et le souvenir de Takeshi, est aussi la route du deuil.

Cet ami, resté dans la montagne, méritait une vie à la hauteur de la beauté de son chant, porté les nuits au cours desquelles les coups des outils ne cessaient jamais contre les parois de la montagne, au cours desquelles la voix était un monde hors de la réalité de la guerre. Une montagne qui devait faire barrage, une montagne qui est devenue tombeau. Où est aujourd’hui partie son âme ? A-t-elle pu sortir de la montagne ? Et ce souvenir de l’américain qui hante Hisao, le retrouvera-t-il pour conjurer la détonation de son rire ?

Ce roman nous parle plus que jamais d’une amitié entre deux hommes, jeunes, qui n’ont pas eu le temps de vivre avant que la guerre ne viennent les détruire. Deux âmes qui se sont rencontrées et reconnues dans la noirceur des boyaux rocheux. Rien ne peut plus être comme avant et Hisao se situe sur cette faille qui le retient dans le passé alors que l’avenir l’attend.

Une lecture très émouvante qui, bien que située dans le temps et géographiquement définie, porte en elle une force bien plus universelle.

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Et vous, suivrez-vous Hisao à la recherche de sa valise ?

👁 « Un repas en hiver » d’Hubert Mingarelli (Stock, 2012)

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Cet article a été publié une première fois le 21 juin 2018. Ce fut le livre de la découverte, il a marqué une étape forte pour moi.

Quelle belle trouvaille chez Emmaüs que ce livre d’Hubert Mingeralli, que je n’avais jamais lu et que j’ai découvert à travers une écriture aussi dure que belle, qui n’a pas peur des mots ni des situations difficilement soutenables.

Quatrième de couverture : « Dans ce nouveau roman, Hubert Mingarelli met en scène des soldats d’une compagnie isolée en Pologne, dont la mission est impossible. Soit ils participent chaque jour aux exécutions sommaires, soit ils sont envoyés dans la campagne alentour pour en ramener un, c’est-à-dire un Juif, qu’ils devront ensuite livrer à leur supérieur et donc à la mort.

Trois hommes, las des fusillades, prennent la route un matin, et avancent péniblement dans la neige, le ventre vide et les pensées tournées vers leur vie civile, sans autre choix que de prendre part à une chasse à l’homme à laquelle ils ne croient pas.

Ce jour-là, ils débusquent presque malgré eux un Juif caché dans la forêt et, soucieux de se nourrir et de retarder leur retour au camp, ils vont procéder dans une maison abandonnée à la laborieuse préparation d’un repas avec le peu de vivres dont ils disposent. Les hommes doivent trouver de quoi faire du feu et réussir à porter à ébullition une casserole d’eau. Ils en viennent à brûler le banc sur lequel ils sont assis, ainsi que la porte derrière laquelle ils ont isolé le Juif. Le tour de force d’Hubert Mingarelli constitue à mettre autour d’une table trois soldats allemands, un jeune Juif et un Polonais de passage dont l’antisémitisme affiché va, contre toute attente, réveiller chez les soldats un sentiment de fraternité vis-à-vis de leur proie.

Se posent alors des questions monstrueuses : Faut-il proposer au Juif de manger ? Et, une fois le repas partagé, faut-il le ramener ou le libérer ?

C’est ici qu’Hubert Mingarelli, dans son style sobre et précis, met le lecteur face à sa conscience et la logique meurtrière à laquelle sont soumis ces hommes. En convoquant la peur, la raison, l’espoir, la folie et l’humanité contenus en chacun d’entre nous. »

Tout le récit amène à un huis clos d’une lourdeur suffocante, même les scènes dans la nature manquent d’air. Ce sentiment m’a impressionnée à la lecture et m’a vraiment marquée.

Ensuite, je suis partagée avec la fin de description proposée en quatrième de couverture qui se termine sur une phrase qui nous fait attendre beaucoup en revirement de situation, en fraternité qui se révèle. Mais la fraternité je ne l’ai pas vue et après ma lecture je ne suis pas en accord avec la mention de ce mot (n’ai-je donc rien compris ?).

Mais revenons un peu sur le récit. Nous sommes en présence de trois soldats nazis qui, pour échapper aux fusillades ignobles mais très courantes dans l’Est, sortent pour aller capturer du Juif. Ce qui m’a frappée dans un premier temps c’est le nombre de pages à lire avant de tomber sur ce mot, Juif. Ils cherchent (sans se démener non plus, l’objectif principal étant quand même d’être dehors, loin de la Shoah par balles) et se déplacent dans l’attente de trouver un homme comme un chasseur attend de croiser sa proie. C’est à la page 39 que le couperet tombe. Même si on le sait en commençant le livre, ce temps pris pour nommer la victime est pour moi une première étape dans la déshumanisation. La victime n’est rien, elle n’est pas victime, d’ailleurs, car elle devient un laisser-passer pour échapper le lendemain à d’autres exécutions de masse.

En route, dans le froid glacial polonais, les trois soldats vont se réfugier dans une maison pour pouvoir tenter de se réchauffer et de faire à manger. Et là l’air se fige, devient épais au fur et à mesure que le temps passe et que la venue d’un Polonais dans le refuge s’installe et s’impose pour partager le repas. Au moment, où j’imagine, nous devrions voir un début de fraternité, je n’ai vu que de la défiance à l’encontre du Polonais, de la provocation, de la violence (et vice-versa). Nous sommes confrontés à des cruautés. Le choix décisif n’est à mon sens pas un regain d’humanité, mais la recherche d’un acte qui pourrait soulager des consciences bien lourdes. Un acte, en somme, particulièrement égoïste, à moins que la conscience soit le dernier bastion de l’humanité. La fin du roman viendra confirmer cet a priori que j’ai eu vis-à-vis du dilemme.

J’ai trouvé ce roman aussi passionnant que dur, mais il a su montrer la déshumanisation des soldats, qui baignent dans l’idéologie nazie depuis l’enfance. Et en même temps, il leur est difficile de faire face aux meurtres de masse auxquels ils ont dû participer. Où se situe la lisière de l’inhumanité, l’humanité peut-elle être totalement annihilée ? En tout cas, elle prend un sacré coup à la lecture de ce livre.

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Et vous, avez-vous lu des œuvres d’Hubert Mingarelli ?

❤ « Simple » de Julie Estève (Stock, 2018)

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Je m’étais promis de lire ce roman en découvrant sa sortie et, vu que je suis longue à la détente avec les promesses que je me fais à moi-même, il m’a fallu un bon paquet de mois pour m’y atteler. Et vraiment, je l’ai pris comme une claque. Lu d’une traite, impossible à arrêter comme les drames impossibles à enrayer.


Quatrième de couverture : « On ne l’appelle jamais Antoine Orsini dans ce village perché au cœur des montagnes corses mais le baoul, l’idiot du coin. À la marge, bizarre, farceur, sorcier, bouc émissaire, Antoine parle à sa chaise, lui raconte son histoire, celles des autres, et son lien ambigu avec Florence Biancarelli, une gamine de seize ans retrouvée morte au milieu des pins et des années 80.

Qui est coupable ?

On plonge à pic dans la poésie, le monde et la langue singulière d’un homme simple, jusqu’à la cruelle vérité. »


Ouverture sur l’enterrement d’Antoine. Cet Antoine que nous allons suivre dans tout le roman, absorbé de pensées, de douleurs et de violences, résultat d’une vie à avoir été malmené, incompris, mis de côté, humilié, violenté. Une histoire qui porte en elle de nombreux malheurs, parmi eux, le décès violent de Florence, alors jeune fille solaire du village, qui subjuguait certains cœurs par sa beauté et réveillait la folie d’autres.

Antoine va remonter le fil de son existence, raconter sa vie à une chaise cassée qu’il veut ramener chez lui. Car les objets et les êtres abîmés ont encore droit de vivre ou d’être, ils ne sont pas justes bons à être jetés. Et il en sait quelque chose. De ses jeunes années à la mort de Florence, c’est aussi le mystère autour du décès qui se dessine, cumulant les suspects jusqu’au terrible dénouement.

Si au début j’ai eu un peu peur du style de l’écriture, je suis vite tombée sous son charme. La magie opère et le lecteur a le sentiment d’être face à un récit authentique avec ce qu’il a parfois d’incohérent quand l’émotion est trop grande. Et des émotions, Antoine en a à revendre ! Au final, du baoul du village ou des autres personnes qui s’estiment normales, le plus clairvoyant sera peut-être celui que la foule montre du doigt en faisant la grimace.

Julie Estève nous livre ici un roman poignant. Si vous ne l’avez pas encore lu, je ne peux que vous le recommander. Pour ma part, je crois qu’il m’a secouée pour un bon moment.

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Et vous, quel coup vous a porté ce livre ?

« Veuf » de Jean-Louis Fournier (Stock, 2011 ; Le Livre de poche, 2013)

Retrouver Jean-Louis Fournier est toujours source de joie pour moi, même s’il s’agit souvent d’évoquer des sujets intimes qui peuvent s’avérer douloureux. Ses livres ont toujours ce double ton, entre la mélancolie et l’espièglerie et c’est quelque chose que j’aime. Même quand je ne suis pas d’accord avec une formulation, j’aime ne pas être d’accord avec lui. Je crois que c’est ça, un lecteur conquis, non ?

Quatrième de couverture : « Je suis veuf, Sylvie est morte le 12 novembre, c’est bien triste, cette année on n’ira pas faire les soldes ensemble. Elle est partie discrètement sur la pointe des pieds, en faisant un entrechat et le bruit que fait le bonheur en partant. Sylvie m’a quitté, mais pas pour un autre. Elle est tombée délicatement avec les feuilles. On discutait de la couleur du bec d’un oiseau qui traversait la rivière. On n’était pas d’accord, je lui ai dit tu ne peux pas le voir, tu n’as pas tes lunettes, elle ne voulait pas les mettre par coquetterie, elle m’a répondu je vois très bien de loin, et elle s’est tue, définitivement.

J’ai eu beaucoup de chance de la rencontrer, elle m’a porté à bout de bras, toujours avec le sourire. C’était la rencontre entre une optimiste et un pessimiste, une altruiste et un égoïste. On était complémentaires, j’avais les défauts, elle avait les qualités. Elle m’a supporté quarante ans avec le sourire, moi que je ne souhaite à personne. Elle n’aimait pas parler d’elle, encore moins qu’on en dise du bien. Je vais en profiter, maintenant qu’elle est partie.

Jean-Louis Fournier souhaitait mourir le premier, il a perdu. Sa femme partie, il n’a plus personne avec qui parler de lui. Alors pour se consoler, ou pour se venger, en nous parlant d’elle, il nous parle de lui. »


Avant de vous parler de son dernier livre, Je ne suis pas seul à être seul, qui m’a aimablement été transmis en service de presse par les éditions JC Lattès via Netgalley (Merci !), je tenais à lire celui qu’il a écrit il y a presque dix ans sur le décès de son épouse, Sylvie. Parce que la solitude s’est installée en plusieurs temps au cours de sa vie, la perte de son épouse a été une épreuve qui le suit encore.

Ce livre, j’avais un peu peur de le lire car il avait le potentiel de me faire sortir toute l’eau du corps à force de pleurer. Soit, je ne suis pas contre perdre quelques petits kilos, mais de là à me dégonfler de 60% de ma masse… Je me lance et je découvre que le dernier Eric-Emmanuel Schmitt, Journal d’un amour perdu, se fait écho à celui-ci. Il y a des convergences sur le sens donné aux affaires de l’être aimé et perdu, sur le fait rageant et incompréhensible que le monde continue de tourner malgré ce décès qui a pourtant arrêté la pendule de la maison.

Jean-Louis Fournier ne va pas bien. Chaque jour est une épreuve pour aller un tout petit peu mieux, pour réapprendre sans Sylvie, cette femme qui a aimé un homme, cet homme qui pense ne pas avoir mérité cet amour. Sylvie. Un phare dans la nuit pour un bateau malmené par la tempête. Des bras rassurants pour celui rongé par la peur de l’abandon. Un regard et une oreille attentifs à celui qui a besoin d’exister aux yeux des autres, quitte parfois à en faire trop. Ce couple a été défait d’un coup, au bout de quarante ans. Il avait encore mille choses à se dire, gentilles ou moins gentilles, le contact n’avait jamais été rompu avant ce jour d’automne et ses feuilles mortes. Alors, seul dans le silence, ou croisant des personnes mal à l’aise avec l’homme veuf — qui rappelle que nous sommes voués à abandonner ou, pire, à être abandonnés — Jean-Louis Fournier va faire un bout de chemin.

Sylvie est partout : dans les objets de la maison, dans les conversations des gens croisés, dans les moindres recoins du quotidien, dans la personnalité de Jean-Louis Fournier. Car aimer et vivre avec quelqu’un, c’est aussi évoluer avec ses goûts et créer des goûts communs. L’absence prend tout l’espace et Jean-Louis va tenir bon pour, aussi, promouvoir le livre de son épouse qui paraît après sa disparition. Une dette envers celle qui a écrit alors qu’elle vivait avec l’écrivain, qui a réussi à réaliser ce dont elle ne se pensait pas capable, qui a su entendre les autres et leur donner la parole, qui toute sa vie a eu le regard tourné vers les autres plus que vers elle-même. Une générosité que la nature rend d’ailleurs bien en offrant un dernier spectacle. Ce jardin que Sylvie a chouchouté va donner ses plus belles roses lors de son premier printemps d’absence, un dernier hommage qui contient un peu d’elle. S’il y a de la beauté, tout ne peut pas être à jeter, non ?

C’est l’histoire d’un couple complémentaire, complice, d’une déchirure, d’une mauvaise blague de la nature qui serait allée trop loin. Un livre tout en douceur dans lequel on retrouve quand même la verve et la répartie de Jean-Louis Fournier, preuve qu’il se bat, qu’il lui reste des forces. Tous les jours, et à tout point de vue, je vais mieux, de mieux en mieux. S’il arrivera à aller un peu mieux, ce n’est pas pour ça qu’il sera désormais possible d’aller bien. Mais, dans le doute, essayons quand même.

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Et vous, quel livre de Jean-Louis Fournier préférez-vous ?

❤ « Le rapport de Brodeck » de Philippe Claudel (Stock, 2007 / Le Livre de Poche, 2009)

J’ignore depuis combien de temps je m’étais promis de lire ce livre cultissime de Philippe Claudel. Mais ce que je sais, c’est que j’ai bien trop attendu. Ce livre, il faut le lire dès qu’on en a l’occasion, car une fois refermé, on se demande comment on a pu passer à côté. Un énorme coup de cœur !


Quatrième de couverture : « Je m’appelle Brodeck et je n’y suis pour rien. Je tiens à le dire. Il faut que tout le monde le sache. Moi je n’ai rien fait, et lorsque j’ai su ce qui venait de se passer, j’aurais aimé ne jamais en parler, ligoter ma mémoire, la tenir bien serrée dans ses liens de façon à ce qu’elle demeure tranquille comme une fouine dans une nasse de fer. Mais les autres m’ont forcé : Toi, tu sais écrire, m’ont-ils dit, tu as fait des études. J’ai répondu que c’étaient de toutes petites études, des études même pas terminées d’ailleurs, et qui ne m’ont pas laissé un grand souvenir. Ils n’ont rien voulu savoir : Tu sais écrire, tu sais les mots, et comment on les utilise, et comment aussi ils peuvent dire les choses […]. »


Brodeck va chercher du beurre au village. Tout va alors basculer. L’Anderer vient d’être assassiné et les hommes présents sur le lieu du crime vont lui demander (sans laisser le choix de la réponse) d’écrire un rapport expliquant l’acte final.

La tension s’installe dès les premières pages et c’est un survivant que nous découvrons à travers les lignes que Brodeck rédige comme une urgence. Une urgence qui prend parfois son temps, qui se perd dans des descriptions de la nature et de son pays d’adoption, mais une urgence quand même de dire les choses. Celles du présent et celles du passé, car il montre parfaitement comment les deux peuvent se lier.

L’Anderer lui, c’est l’autre, l’étranger. Arrivé un jour au village, installé à l’auberge où il sera assassiné, c’est un personnage trop original pour passer inaperçu et trop singulier pour ne pas éveiller les soupçons. Mais soupçonner de quoi ? Alors la guerre qui appartient au passé s’invite à nouveau dans le présent. Un personnage magnifique de subtilité et de douceur, presque insaisissable et qui dérange par sa différence.

Menacé, pressé par les hommes du village, Brodeck va avancer dans la rédaction de son rapport. Mais ce que les villageois ignorent, c’est que deux rapports sont en cours de rédaction : l’officiel qui sera donné au maire, l’officieux qui est plus personnel et va plus loin dans les révélations. L’officieux, c’est celui que nous avons entre les mains, faisant de nous les dépositaires d’un récit précieux.

Brodeck va y transcrire les relations entre les hommes, les travers, les lâchetés et les courages, parfois – trop rarement. Il va également revenir sur la guerre, sa déportation et l’épreuve des camps. Il va revenir dessus car cette période dit des choses des hommes du village, de l’homme qu’il est lui-même re(de)venu et de sa femme. Cette femme qui m’a émue aux larmes même si elle ne dit rien et ne fait que murmurer une chanson, encore et encore. Les personnages proches de Brodeck sont beaux, heureusement. Ils sont la lumière dans la noirceur du village.

Fermer les yeux et faire comme si rien ne s’était jamais passé ne fait pas disparaître les fautes. Philippe Claudel le prouve de façon impressionnante. Comme dans d’autres romans, Philippe Claudel ne date pas et ne localise pas avec précision les événements. Il donne des pistes, laisse des indices et fait écho à l’histoire sans cloisonner le récit pour lui donner une dimension plus large. Si je peux donner un conseil à celles et ceux qui ne l’ont pas encore lu, allez-y sans hésiter, ce livre est un mélange de philosophie, de témoignage fictif mais malgré tout très réel et d’humanisme.

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Et vous, quel est votre livre préféré de Philippe Claudel ?

« Mon autopsie » de Jean-Louis Fournier (Stock, 2017)

Je poursuis avec ce livre ma découverte de l’univers de Jean-Paul Fournier, que j’apprécie beaucoup mais dont le ton de cette autopsie change un peu. Si l’on arrive à rire de tout (ou presque) dans ses précédents livres, ici cela a été pour moi plus sérieux.


Quatrième de couverture : « Je suis mort. C’est pas le pire qui pouvait m’arriver.

Jean-Louis Fournier s’est fait autopsier par la charmante Egoïne pour qu’on sache ce qu’il avait dans la tête, dans le coeur et dans le ventre. »


Jean-Louis Fournier est mort et a souhaité donner son corps à la science. Chapitre après chapitre, une étudiante (aux pratiques qui ne semblent pas très conventionnelles) va procéder à son autopsie. Cette étudiante, il va l’appeler Egoïne.

Egoïne : petite scie à main, composée d’une lame terminée par une poignée.

Mais dans ce nom on trouve aussi le terme d’ego. Commence alors le décortiquage des membres et des organes de l’auteur à la lumière de ce qu’il fut et de son histoire. Ce texte, qui se lit très bien et qui nous met plus que jamais en intimité avec Jean-Louis Fournier, prend des allures de mea culpa en même temps qu’il sonne comme la conclusion d’une vie.

Certains passages doux-amers nous font sourire et nous disent que, même en position de mort, l’auteur ne manque pas de mordant (après tout, il n’a plus rien à perdre). D’autres passages, que l’on sent plus douloureux, nous montrent un homme qui arrive à l’âge auquel ont fait les comptes. Les inquiétudes permanentes, les erreurs, les plaisirs, les amours, les regrets, les mésentantes, les rencontres, les deuils, les absences.

Si vous aimez cet auteur, je pense que ce texte vous surprendra par son sérieux et ses inquiétudes plus difficiles à habiller de malice que pour d’autres de ses ouvrages. Il est parfois une pierre supplémentaire qui permet de comprendre des aspects des autres livres, il est comme un journal de la fin d’une carrière alors que nous, lecteurs, voudrions qu’elle ne s’arrête pas.

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Et vous, quel est votre livre préféré de Jean-Louis Fournier ?

❤ « La petite fille de Monsieur Linh » de Philippe Claudel (Stock, 2005)

Je tiens à remercier chaleureusement BobidiBooks qui m’a donné envie de découvrir ce livre magnifique, qui est aujourd’hui un immense coup de cœur ! Je me suis attachée, j’ai eu de la peine, j’ai ri, j’ai souri, j’ai pleuré. Bref, j’ai adoré et je ne peux que le conseiller à mon tour à toute personne ne l’ayant pas lu ! ♥


Quatrième de couverture : « Monsieur Linh est un vieil homme. Il a quitté son village dévasté par la guerre, n’emportant avec lui qu’une petite valise contenant quelques vêtements usagés, une photo jaunie, une poignée de terre de son pays. Dans ses bras, repose un nouveau-né. Les parents de l’enfant sont morts et Monsieur Linh a décidé de partir avec Sang diû, sa petite fille. Après un long voyage en bateau, ils débarquent dans une ville froide et grise, avec des centaines de réfugiés. Monsieur Linh a tout perdu. Il partage désormais un dortoir avec d’autres exilés qui se moquent de sa maladresse. Dans cette ville inconnue où les gens s’ignorent, il va pourtant se faire un ami, Monsieur Bark, un gros homme solitaire. Ils ne parlent pas la même langue, mais ils comprennent la musique des mots et la pudeur des gestes. Monsieur Linh est un cœur simple, brisé par les guerres et les deuils, qui ne vit plus que pour sa petite fille. Philippe Claudel accompagne ses personnages avec respect et délicatesse. Il célèbre les thèmes universels de l’amitié et de la compassion. Ce roman possède la grâce et la limpidité des grands classiques. »


Ce roman touche au sublime, je ne peux pas le dire autrement. Il nous confronte à la guerre, aux traumatismes, à l’exil, à la solitude, à la perte de repères, à la culpabilité mais nous donne aussi à voir l’amitié, l’amour et la bienveillance. Il est un regard sur le monde et sur les relations entre les hommes. Il est immensément humain.

Je me suis laissée porter par les pensées de Monsieur Linh, son courage et sa détermination à vivre pour sa petite fille, dont il nous explique qu’elle est la seule survivante de sa famille après des bombardements. Je me suis battue à ses côtés et mon coeur l’encourageait. Dans une ville totalement différente de son village, désormais lointain, il devra réapprendre le quotidien. Rencontrant Monsieur Bark, ce quotidien se fera plus doux. Pas besoin de se comprendre avec les mots quand les gestes et les regards suffisent pour se reconnaître dans la solitude et la tristesse de l’autre. Une amitié forte et émouvante va se construire et il faudra lutter pour la conserver, comme lutter pour prendre soin de la petite fille tant chérie et si sage.

Une construction narrative qui ne pourrait pas mieux fonctionner, un dénouement qui noue le ventre et ouvre les vannes lacrymales. Je ne peux que vous inviter à le découvrir sans vous en dire plus.

Je conclus cet article en m’engageant solennellement *mains sur le cœur* à découvrir d’autres romans de cet auteur, certains m’attendant déjà dans ma bibliothèque et qui ne sauraient y être oubliés plus longtemps. Cette lecture a été une rencontre et, comme pour Hubert Mingarelli, je ne peux la laisser passer davantage. Un immense merci !

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Et vous, quel(s) livre(s) de Philippe Claudel conseilleriez-vous pour poursuivre la découverte de cet auteur ?

« Il a jamais tué personne, mon papa » de Jean-Louis Fournier (Stock, réed. 2008)

C’est devenu automatique : je croise un livre de Jean-Louis Fournier, je le prends. Et, par chance, les rayons de mon Emmaüs local en contiennent toujours de nouveaux. *Joie* J’ai lu il y a quelques mois Ma mère du Nord et j’ai alors senti qu’il me manquait une brique pour pouvoir le chroniquer. Cette brique c’est justement ce livre, celui sur le père de Jean-Louis Fournier.


Quatrième de couverture : « Mon papa était docteur. Il soignait les gens, des gens pas riches, qui souvent ne le payaient pas, mais ils lui offraient un verre en échange, parce que mon papa, il aimait bien boire un coup, plusieurs coups même, et le soir, quand il rentrait, il était bien fatigué. Quelquefois, il disait qu’il allait tuer maman, et puis moi aussi, parce que j’étais l’aîné et pas son préféré. Il était pas méchant, seulement un peu fou quand il avait beaucoup bu. Il n’a jamais tué personne, mon papa, il se vantait.

Jean-Louis Fournier raconte ses souvenirs d’enfance dans une ville de province, au milieu d’une famille pas tout à fait comme les autres, avec un papa docteur qui s’habille comme un clochard, fait ses visites en pantoufles, perd sa voiture dans un champ de betteraves. Un papa qui faisait rire ou qui faisait pleurer ? »


Jean-Louis Fournier est à mes yeux un gymnaste des émotions et un poète de l’introspection. Même les livres qui m’ont le moins touchée m’ont quand même fait de l’effet. Et ce livre m’a particulièrement émue car il est rédigé avec la voix intérieure de l’enfance, le regard naïf (ou serait-ce de la protection) sur le monde et les choses, la langue candide qui broie le cœur face aux événements.

Ce livre, c’est un moyen de faire la paix, de mettre des mots sur des souvenirs difficiles, des souvenirs d’enfance sur lesquels chaque individu se construit. Ces ratés, ces moments de gêne ou de peur, mais aussi ces moments de joie qui sont comme un soleil entre deux saisons de brouillard. Car il savait être drôle ce papa, mais il ne l’était pas souvent. Il était surtout fatigué, à différents degrés.

Jean-Louis Fournier réussit à nous faire rire avec ses mots d’enfant et à nous émouvoir, nous entendons sa petite voix et à travers les descriptions nous prenons conscience de l’ampleur des différentes situations. C’est parfois drôle, touchant, émouvant, grotesque, clownesque mais triste, très triste aussi.

Le petit et le grand Jean-Louis font la paix avec ce père loin d’être parfait. Un père reste un père et nous revivons avec l’auteur des épisodes marquants de son enfance, des jeux de piste dans lesquels il essaie de comprendre qui il est, ce papa. Lui qui a vécu la guerre, s’est engagé dans la résistance, portait une dépression et une colère difficiles à gérer, soignait les malades et constatait les décès des condamnés à mort. Lui seul avait les réponses à ces questions et il ne les a pas dévoilées avant de mourir. Ne reste que souvenirs, suppositions et acceptation de ce qui fut.

« Maintenant j’ai grandi, je sais que c’est difficile de vivre, et qu’il ne faut pas trop en vouloir à certains, plus fragiles, d’utiliser des mauvais moyens pour rendre supportable leur insupportable. » (p. 147)

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Et vous, quel livre de Jean-Louis Fournier préférez-vous ?

« La servante du Seigneur » de Jean-Louis Fournier (Stock, 2013)

J’ai découvert Jean-Louis Fournier avec Où on va papa ? qui m’avait autant émue que mise face à une énorme difficulté au moment d’en faire la chronique : j’étais mal à l’aise avec l’humour noir. Avec La servante du Seigneur, ça va beaucoup mieux.


Quatrième de couverture : « Ma fille était belle, ma fille était intelligente, ma fille était drôle… Mais elle a rencontré Monseigneur. Il a des bottines qui brillent et des oreilles pointues comme Belzébuth. Il lui a fait rencontrer Jésus. Depuis, ma fille n’est plus la même. Elle veut être sainte. Rose comme un bonbon, bleue comme le ciel. »

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Oui, il y a de l’humour noir mais il y a aussi une introspection et une douleur de père. Où est passée sa fille si gaie, si complice ? C’est à sa recherche qu’il part, alors qu’elle a choisi de suivre une voie sur laquelle il ne l’imaginait pas vraiment. Pas comme ça. Pas en se coupant du monde et considérant détenir la vérité de Dieu. Pas comme ça. Pas avec la violence dans leurs échanges et les reproches sur une enfance qu’il avait cru heureuse.

Jean-Louis Fournier cherche à renouer quelque chose avec sa fille autant qu’il souhaite pouvoir la comprendre et la voir telle qu’elle est, malgré des colères perçantes, que je comprends. Des incohérences ont de quoi faire naître la fureur, mais l’amour reste un lien indéfectible et, dans cette relation difficile, l’amour est douloureux.

Elle ne l’a jamais vraiment abandonné mais elle n’est pas là non plus quand il voudrait lui parler, l’appeler, la voir. La relation est conditionnée et la menace de l’enfer jamais très loin.

Un très beau récit, qui brise quand même pas mal le cœur, sur deux êtres qui s’aiment mais qui ne se comprennent plus. Un moment aussi tendre que violent, des mots qui touchent et percent le ventre, qui tuent le diable qui pourrait s’y trouver, si seulement il existait (il a sacrément bon dos).

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Et vous, quel livre de Jean-Louis Fournier préférez-vous ?

« Un autre Brooklyn » de Jacqueline Woodson (Stock, 2018)

Je ne connaissais pas Jacqueline Woodson avant de parcourir ce livre, elle est pourtant une auteure prolifique qui a été remarquée en tant que finaliste et lauréate du National Book Award. Plus impressionnant encore, elle a reçu cette année le prix Alma, qui récomprense chaque année « un auteur, un illustrateur ou une organisation œuvrant pour la promotion de la lecture ».


Quatrième de couverture : « La première fois que j’ai vu Sylvia, Angela et Gigi, ce fut au cours de cet été-là. Elles marchaient dans notre rue, en short et débardeur, bras dessus bras dessous, têtes rejetées en arrière, secouées de rire. Je les ai suivies du regard jusqu’à ce qu’elles disparaissent, me demandant qui elles étaient, comment elles s’y étaient prises pour… devenir.

August, Sylvia, Angela et Gigi sont quatre adolescentes, quatre amis inséparables qui arpentent les rues de Brooklyn des années 1970, se rêvant un présent différent et un futur hors du commun. Mais un autre Brooklyn où le danger rôde à chaque coin de rue, menace les espoirs et les promesses de ces jeunes filles aux dernières heures de l’enfance. »


J’avais prévu cette lecture dans le cadre du mois consacré à la lutte pour les droits civiques, mais il s’agit finalement d’un tout autre propos à mes yeux. Il est davantage question de la construction de la réalité et de l’avenir par des adolescentes, la protection que l’on peut s’apporter les unes aux autres pour être plus fortes dans une société dangeureuse pour nous. Et la pauvreté dans un pays riche qui est un terreau fertile pour la violence et l’autodestruction, celle du désespoir.

Un autre Brooklyn c’est cela, un groupe de quatre jeunes filles qui se soutiennent, se préviennent, dans un quartier qui ne respecte pas et dont les recoins regorgent de plaies. Ce jeunes filles ont toutes leurs fêlures, souvent liées à la pauvreté, mais aussi à la société américaine et à la guerre du Vietnam dont les fantômes détruisent autant que les balles.

Un autre Brooklyn c’est celui qu’on s’imagine pour échapper à la réalité, se réfugier dans une perception du présent et une construction de l’avenir. Un autre Brooklyn c’est aussi celui vers lequel vont les Blancs qui laissent le quartier pour en trouver un autre. Un autre Brooklyn, c’est le quartier qui change à mesure que les relations entre les quatre amies évoluent elles-aussi, pour se fatalement distendre.

Le livre aborde également des aspects de la Nation of Islam et de la rupture entre Blancs et Noirs, cette rupture et un poids de la religion qui n’aura pas de prise sur August, personnage principal, qui voudra avant tout être libre.

Un roman qui se lit tout seul, emprunt d’autant de douceur que d’amertume, cru parfois, intelligemment construit. Une lecture que j’ai beaucoup appréciée, plus complexe qu’il n’y paraît.

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