❤ « My broken Mariko » de Waka Hirako (Ki-oon, 2021)

J’attendais tellement la parution de ce manga qu’il fait désormais partie du club des aussitôt achetés, aussitôt lus, aussitôt aimés. La présentation de ce manga m’avait séduite dès son annonce de parution et la lecture s’est révélée vraiment poignante. Je ne vous cache pas que j’ai bien essayé de résister mais quelques larmes ont coulé. Très belle surprise également, le manga principal est suivi d’un manga court de l’auteure, Yiska, son premier, que j’ai également beaucoup apprécié. Une mangaka à suivre de près !

Quatrième de couverture : « Quand Tomoyo apprend aux informations la mort de son amie Mariko, elle n’en croit pas ses oreilles. Elles s’étaient pourtant vues la semaine précédente, sans que rien ne laisse présager un tel drame. Mariko, à la jeunesse brisée, qui lui vouait une admiration sans bornes et qui s’est vraisemblablement suicidée…

Tomoyo ne contient pas sa rage : elle doit trouver un moyen de rendre un dernier hommage digne de ce nom à sa seule confidente. Pas question de laisser le père violent de la jeune fille prendre les choses en main ! Bouleversée et confuse, elle se précipite chez lui, vole l’urne funéraire et, malgré les coups, hurle les mots de colère que Mariko a gardés en elle pendant toutes ces années ! Les précieuses cendres sous le bras, Tomoyo se lance dans une course effrénée, en quête de salut pour son amie comme pour elle-même. »

Mariko s’est suicidée. Tomoyo, sa meilleure amie l’avait vue la semaine précédente, elle ne comprend pas, elle n’accepte pas. Mais surtout elle sait toute la souffrance que la jeune femme avait en elle, les maltraitances de son père dans son enfance et son adolescence, le chemin parfois autodestructeur qu’elle prenait sous l’emprise de ses traumatismes. Impossible pour Tomo de laisser les cendres de son amie de toujours entre les mains sales de ce père infâme. Elle refuse d’abandonner Mariko et décide de tout faire pour lui rendre un dernier hommage, lui offrir une éternelle liberté.

Ce road trip est autant pour Mariko que pour Tomo qui doit accepter de dire au revoir à sa plus proche amie, qu’elle aimait d’une façon complexe mais entière. Un parcours sur le deuil d’un être cher, le deuil d’une partie de sa vie qui sera changée à jamais, le deuil d’une facette de l’avenir. En se replongeant dans les lettres de Mariko la mémoire de Tomo se réveille et révèle des moments de leur vie, des plaies de Mariko, de ses peurs, du piège dont elle cherche la sortie. Face à sa douleur et à sa solitude, face à la peur d’oublier et aux souvenirs qui, plus elle les invoque, semblent lui échapper, Tomo fait revivre dans son esprit Mariko et cherche à comprendre, à accepter.

Il est ici question du cheminement du deuil mais aussi de la disparition soudaine et violente d’un proche avec ce que ça implique de culpabilité pour ceux qui restent et n’ont rien réussi à empêcher. Le coeur du propos concerne plus spécifiquement les violences faites aux enfants, les traumatismes et la difficulté de se reconstruire quand nos fondations sont brisées. J’ai grandement apprécié la personnalité de Tomoyo qui fait exploser en morceaux les stéréotypes des personnages féminins dans le manga, une volonté clairement exprimée par Waka Hirako et très perceptible à la lecture : ça fait du bien ! Et Mariko, bien entendu, que nous aurions aussi voulu protéger de toutes nos forces et dont la courte vie nous brise le coeur.

Yaski est un court manga-western qui nous propose d’explorer les discriminations de certaines populations aux États-Unis, la mise à l’écart et la perte d’identité en même temps que la violence organisée. Un manga court mais efficace.

D’un trait aussi vif et explosif que le caractère de Tomoyo, Waka Hirako explore des sujets de société graves dont il est nécessaire de parler. Son souhait est de poursuivre cette exploration, je la suivrai sans aucun doute dans son travail.

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Et vous, quel•le mangaka bougeant les lignes du genre conseilleriez-vous ?

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« Élise » de Fabian Menor (La joie de lire, 2020)

Depuis sa parution je louche sur ce livre à mi-chemin entre album jeunesse et roman graphique jeune public. Je suis très sensible aux livres qui abordent les enfances blessées et les mauvais traitements dont sont victimes les enfants et mineur•e•s, c’est donc sans surprise que je me suis tournée vers ce titre.

Quatrième de couverture : « A une époque où les professeurs ont le droit de lever la main sur les élèves, le quotidien d’Élise ressemble à celui de n’importe quelle petite fille. Enfin presque… »

Intégralement réalisé en noir et blanc, conçu à partir des souvenirs de la grand-mère de l’auteur, nous faisons un saut dans le temps, à la fin des années 1940, alors que le respect physique des enfants n’était pas encore inscrit dans les textes. Le quotidien n’est pas toujours simple, chaque jour une angoisse la poursuit : les brimades dont elle est victime, avec ses camarades, à l’école.

L’institutrice d’Élise a des méthodes qui n’ont rien de pédagogiques mais tout de sadiques. D’humiliations en coups, Élise va essayer d’ouvrir les yeux de ses parents sur ce qui se passe entre les quatre murs de la classe. Mais comment faire porter une voix d’enfant face à celle des adultes ?

Heureusement, Élise peut compter sur son chien et ses autres animaux, avec lesquels elle a un lien très fort, pour panser ses journées. Mais beaucoup de choses vont se passer en peu de temps et Élise va à la fois se rendre compte de ce dont elle est capable et grandir.

Cet album jeunesse propose une immersion dans le monde de la bande dessinée pour les jeunes lecteurs•trices et la sensibilisation de ces mêmes jeunes aux injustices du quotidien, à la possibilité de les affronter et de changer les choses. Un bel hommage de l’auteur à l’enfance parfois maltraitée de sa grand-mère, qui montre aux enfants ce que l’école a pu être par le passé et qui transmet le sens de l’indignation et de la résistance.

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Et vous, quels livres jeunesse sur les violences scolaires recommandez-vous ?

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« Je ne suis pas fou » d’André Marois (Héliotrope, 2019)

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Petite découverte anxiogène pour ce début d’année venteux et gris : de quoi mettre de l’ambiance à mes moments de détente littéraire. Un livre de peu de pages (128) mais qui n’a pas besoin de plus pour installer doute et malaise, fort inconfort et, au final, une lecture qui marque comme un coup sur une peau bien trop fragile.

Quatrième de couverture : « Chaque soir, c’est pareil : maman prépare une tarte aux pommes et l’enfourne. Papa et moi regardons les nouvelles à la télé. Après l’émission, un cri retentit toujours de la cuisine, puis le bruit d’une chute. Mon père et moi nous précipitons. La tarte est renversée sur le sol ; maman explique qu’elle l’a fait tomber à cause du moule qui était brûlant. Papa s’allume une cigarette sans rien dire et part à la recherche de son cendrier. Chaque soir c’est pareil, et mes parents font comme si de rien n’était. Je crois qu’ils veulent me rendre fou.

Dans ce roman glaçant, un jeune garçon voit sa maison devenir le théâtre d’une lutte pour sa survie et doit parer les coups diaboliques de ceux dont il attend pourtant le réconfort. »

Un jeune garçon nous invite dans son quotidien, en quelque sorte comme uniques témoins de la vie qu’il subit. Ses parents veulent le rendre fou et il résiste, il observe et fait en sorte de ne pas réagir afin que les adultes ne le soupçonnent pas de comprendre. A nous de nous positionner : a-t-il raison ou est-il dans un état paranoïaque ? Du doute à la conviction, nous sommes positionnés en adultes qui doivent croire ou non la parole de l’enfant.

Peu à peu l’air s’épaissit et les actes glaçants se succèdent. Nous vivons avec ce jeune et triste héros (car le courage ne lui manque pas) les épreuves, nous avons peur avec lui, nous lui soufflons des pensées réconfortantes, nous ne comprenons pas les rouages du piège qui l’entoure mais ne pouvons que faire face.

Efficace, ce livre l’est. Mais quelle finalité à cette folie ? Poussé jusqu’à un extrême qui est un arbre qui cache une forêt, il nous tord le ventre et l’esprit autour de la maltraitance faite aux enfants. Des scènes absurdes dont on cherche le sens ne mettent que plus en évidence que rien ne justifie les violences physiques et/ou psychologiques.

Ce livre a été ma première rencontre avec André Marois, auteur qui écrit beaucoup de romans noirs pour adultes comme pour la jeunesse. Je ne peux que confirmer, c’est très sombre. Si vous souhaitez vous y frotter je ne peux que vous y inviter, mais tout en vous prévenant qu’il secoue et qu’il vous faudra prendre une grande inspiration avant de vous lancer. Car l’air viendra à manquer.

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Et vous, connaissez-vous cette maison et avez-vous d’autres livres à en recommander ?