« Mon père couleur de nuit » de Carl Friedman (Folio Gallimard, 2003)

Ce roman avait, jusqu’à présent, échappé à mon radar et pourtant il est recommandé en lecture scolaire, édité également dans la collection Étonnant classiques chez Flammarion. Positionné du point de vue d’une enfant, et vous savez probablement que j’ai un faible pour ce procédé narratif, je n’ai pu résister et je vous le conseille dès à présent.

Quatrième de couverture : « Le père d’Hannah est un survivant des camps de concentration. Il fait partager chaque jour à sa famille sa souffrance et les atrocités qu’il a vécues : les baraquements, la faim, les tortures, les maladies, le travail forcé… Peu à peu, cet univers de mort et de douleur s’empare de la vie de la jeune Hannah qui tente de dire l’indicible avec ses mots d’enfant, légers comme des bulles.

Hannah parviendra-t-elle à arracher son père à la nuit de ses souvenirs ? La tendresse et l’innocence pourront-elles le sauver de la barbarie et le ramener à la vie ?

Un roman d’une force étonnante. »

Publié à la fois chez Gallimard, pour un public adulte, et chez Flammarion, pour une lecture en classe de 3ème, je pense qu’il est effectivement adapté à une lecture à partir de 15 ans. Si certains chapitres peuvent peut-être se lire avant cet âge, la plupart demandent une certaine matûrité ainsi que des connaissances sur la Seconde Guerre mondiale, la déportation et les camps. Mais l’une de ses forces se situe dans le fait que sans avoir des connaissances exhaustives il replace des moments, des situations marquantes qui témoignent de la vie dans les camps. Une œuvre littéraire qui se positionne très bien comme outil pédagogique mais aussi comme roman de sensibilisation et de mémoire pour les publics qui ne sont plus sur les bancs de l’école. Et ça, c’est déjà un point très positif !

Une enfant nous parle de son père, Jochel, qui a le camp. Avec ses deux frères et sa mère, elle reçoit au quotidien le témoignage d’un père qui a connu la déportation et dont les souvenirs débordent, ont besoin d’être exprimés. Si les enfants comprennent plus de choses qu’on ne peut le penser, comment comprendre ce qui est parfois indicible ? La beauté de ce texte réside dans ce qu’il transmet au lecteur et dans l’imagination des enfants à tordre le sens en essayant de se représenter ce qu’ils n’arrivent pas à saisir (et à ne rien oublier pour, un jour, comprendre complètement en remettant toutes les pièces du puzzle à leur place).

Positionné dans les années 60 (le procès Eichmann se déroule au cours du récit), après des années de silence sur la Shoah dans les sociétés européennes, la parole se libère au sein du foyer familial, quand il est possible de dire.

Chaque chapitre se concentre sur un moment de vie quotidienne au cours duquel Jochel va se livrer à sa famille. Deux à trois pages maximum à chaque fois, pour un ensemble de souvenirs qui relate à la fois la vie d’un père et la vie de la famille qui se construit, dans un passé-présent, car il n’est pas toujours facile pour les enfants de faire face aux souvenirs qui leur sont confiés.

En liant les souvenirs traumatiques d’un père et l’innocence de sa fille, Carl Friedman mêle le poids de l’histoire qui ne doit être oubliée et l’espoir dans les futures générations. Elle nous parle aussi de la responsabilité de chacun à être gardien de la mémoire : familiale mais aussi de l’humanité.

Pour en savoir plus

 


Ils/Elles l’ont aussi lu et chroniqué : Le coin lecture d’Arsène


Et vous, connaissiez-vous ce livre ?

 

Retrouvez-moi aussi sur :

YouTubeInstagram

« Le retour de la bondrée » d’Aimée de Jongh (Dargaud, 2016)

Je me suis récemment inscrite sur le site de lecture en ligne spécialisé dans la littérature graphique : Izneo. Ce livre est le premier sur lequel je me suis jetée, enthousiasmée autant pa sa couverture sublime que par ma lecture précédente d’Aimée de Jongh avec L’obsolescence programmée de nos sentiments.


Quatrième de couverture : « L’histoire de Simon, jeune libraire au bord de la faillite, marqué par un événement dramatique, va devoir faire face à ses souvenirs. Entre rêve et réalité, entre passé et présent, un récit intimiste et touchant en noir et blanc, réalisé par une jeune et talentueuse auteure néerlandaise, Aimée de Jongh. Récompensée en 2015 par le Prix Saint-Michel (Bruxelles). »


C’est l’histoire d’un événement présent qui fait ressurgir des souvenirs enfouis du passé. Des souvenirs enfermés, cloisonnés, cachés dans une boîte mentale hermétique. Simon va dès lors être confronté à sa jeunesse et à sa violence, étouffé dans la culpabilité du processus du et si… Et si j’en avais parlé avant que ça ne dégénère ? Et si je n’étais pas intervenu ? Et si j’avais pu tout dire après coup ? Et si j’étais responsable ?

Son échappatoire et sa passion d’enfance, l’ornithologie, le reprend, comme un pont entre le passé et le présent. D’un vol d’aile, le voyage se fait dans son esprit. Les visages, les lieux et le moment. Ce moment qui te dit que rien ne sera plus comme avant.

Dans un mélange de réalité, de rêve et de souvenirs, Aimée de Jongh nous propose un voyage mental blessé qui, s’il reste singulier, peut faire écho à nos propres blessures d’enfance (qu’elle qu’en soit la taille) qui parfois reviennent se conjuguer au présent sans que l’on puisse les contrôler. Elle questionne les notions de responsabilité, de promesse et de fidélité à l’enfant que nous avons été.

Pour en savoir plus

 


Ils/Elles l’ont aussi lu et chroniqué : Une vie, des livres


 

Et vous, connaissez-vous cette plateforme de lecture en ligne ?